Venezuela: Le pays au bord du chaos

Caracas – Le Venezuela semblait dimanche au bord de l’explosion après le rejet par le gouvernement du référendum exigé par l’opposition pour révoquer le président Nicolas Maduro, qui avait déjà menacé de saisir des usines, d’emprisonner les patrons rétifs et d’organiser des exercices militaires.

“Nicolas Maduro ne va pas quitter le pouvoir suite au référendum parce qu’il n’y aura pas de référendum (…) Les responsables de l’opposition savent qu’il ne va pas y avoir de référendum parce qu’ils s’y sont pris trop tard, trop mal et en commettant des fraudes”, a déclaré le vice-président Aristobulo Isturiz lors d’un rassemblement de soutien à la présidente brésilienne Dilma Rousseff.  

Le gouvernement chaviste (du nom du président défunt Hugo Chavez, au pouvoir de 1999 à 2013 et mentor de Nicolas Maduro) fait le parallèle entre le Venezuela et le Brésil, où la présidente de gauche a été écartée du pouvoir par le parlement, qu’elle accuse de coup d’Etat. 

“Ils devront tous nous tuer avant de nous faire un coup d’Etat parlementaire”, a ajouté Aristobulo Isturiz. Les autorités électorales doivent encore se prononcer officiellement sur la recevabilité d’un référendum. 

Ces derniers jours, le président Maduro et ses proches ont multiplié les mesures répressives et les déclarations incendiaires face à une “menace extérieure” non identifiée.  

Depuis la fin 2015 et la victoire d’une coalition d’opposition aux élections législatives, ce pays pétrolier est confronté à une crise politique, économique et sociale qui attise les tensions. 

Coupures d’électricité quotidiennes, services publics opérationnels uniquement deux jours par semaine, pillages de commerces, protestations, lynchages : la situation devient chaque jour un peu plus chaotique. 

A l’instar de l’opposition, les experts pointent le risque “d’explosion” du Venezuela alors que sept Vénézuéliens sur dix réprouvent la gestion de leur président, selon un sondage de Venebarómetro. 

“Le gouvernement semble mettre en place un cadre légal pour libérer les mains des militaires qui pourront réprimer” les manifestations pour réclamer le référendum, estime l’analyste Benigno Alarcon. Selon lui, les mesures annoncées par le chef de l’Etat pourraient limiter le droit de manifester et autoriser les détentions préventives sans décision d’un juge. 

Nicolas Maduro a décrété dans la nuit de vendredi à samedi l’État d’exception, faisant état de “menaces extérieures”, avant d’ordonner samedi la saisie des usines “paralysées par la bourgeoisie” et l’emprisonnement des entrepreneurs accusés de “saboter le pays”, ainsi que des manoeuvres militaires la semaine prochaine. 

Pourraient être concernées quatre usines du groupe Polar, la plus importante société dans le secteur alimentaire au Venezuela, qui ont arrêté la production le 30 avril dernier. 

D’autres sites pourraient être visés, sachant que les entreprises du pays ne travaillent qu’à 43,8% de leurs capacités, faute de devises étrangères (contrôlées par l’Etat) pour payer leurs fournisseurs internationaux, comme l’affirment les entrepreneurs vénézuéliens. 

“Nous courrons au désastre”, a affirmé dimanche à l’AFP le député d’opposition et économiste José Guerra. 

Le Venezuela, autrefois riche producteur pétrolier grâce à ses réserves, les plus importantes au monde, est plongé dans une grave crise avec la chute des cours du brut, qui apporte 96% de ses devises. 

Le pays a subi en 2015 une inflation de 180,9%, une des plus élevées au monde, et un recul du PIB de 5,7%, pour la deuxième année consécutive. 

Samedi, le gouvernement chaviste et l’opposition se sont, une nouvelle fois, défiés dans la rue. 

Nicolas Maduro en a profité pour accuser une nouvelle fois les Etats-Unis de vouloir “en finir avec les courants progressistes en Amérique latine”. 

D’après le Washington Post, des responsables des services de renseignements américains estiment que le gouvernement vénézuélien pourrait être renversé par une insurrection populaire cette année. 

En face, l’opposition exige la tenue d’un référendum pour révoquer le président. “Elle sait que les manifestations sont le seul mécanisme pour faire monter la pression et le gouvernement doit arrêter cela”, a résumé l’analyste Benigno Alarcon. 

Le bras de fer entre chavistes et anti-chavistes s’est accentué depuis que l’opposition a rassemblé début mai 1,8 million de signatures pour lancer le processus du référendum, qu’elle espère organiser d’ici fin 2016.                                                                                                                      

Crédit photo: Juan Barreto

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